Alex Harvey
Retour sur un parcours de champion
Dans sa récente biographie Alex Harvey, Le prince, écrit par le journaliste Simon Drouin, Alex Harvey revient sur sa carrière exceptionnelle. Fondeur canadien le plus décoré de l’histoire, quintuple médaillé des Championnats du monde de la FIS, il compte 20 podiums de la Coupe du monde à son palmarès. Si cet ouvrage lui permet de se remémorer ses victoires, Alex Harvey y dévoile aussi l’envers du décor du sport de haut niveau, et s’exprime sur tous les sujets : famille, amitié, amour, dopage, argent, politique du sport, etc. Rencontre avec cet athlète hors pair aujourd’hui avocat.
CHEZ VOUS , LE SPORT ÉTAIT UNE AFFAIRE DE FAMILLE. VOTRE MÈRE ÉTAIT MÉDECIN DU SPORT ET VOTRE PÈRE L’ATHLÈTE QUE L’ON CONNAÎT [PIERRE HARVEY EST LE PREMIER CANADIEN À AVOIR REMPORTÉ UNE VICTOIRE EN COUPE DU MONDE DE SKI DE FOND]. COMME OBÉLIX, VOUS ÊTES TOMBÉ DEDANS TOUT PETIT?
Oui, cette passion pour le sport va même au-delà de ma famille immédiate, puisque la rue où j’ai grandi et où j’habite aujourd’hui avec ma conjointe et ma fille abrite plusieurs olympiens en ski de fond et en cyclisme. C’est un quartier où il y a beaucoup de sportifs. C’était donc pour moi une normalité que de faire du sport.
EN LISANT VOTRE LIVRE, ON A L’IMPRESSION QUE VOTRE PARCOURS N’AURAIT PAS ÉTÉ LE MÊME SANS LE TRIO QUE VOUS AVEZ FORMÉ AVEC LOUIS BOUCHARD, VOTRE ENTRAÎNEUR, ET DEVON KERSHAW, VOTRE COÉQUIPIER. LE SUCCÈS EST-IL UNE AFFAIRE D’ÉQUIPE?
Absolument. Même si la performance en tant que telle est individuelle, les athlètes de haut niveau passent la majorité de l’année à s’entraîner pour les compétitions, à voyager loin de chez eux. Leurs coéquipiers et entraîneurs font partie de leur quotidien. Sans eux, ils ne pourraient arriver à leurs fins. D’ailleurs, lors de ma dernière saison, plusieurs de mes coéquipiers sont partis à la retraite et cela a beaucoup affecté ma joie de voyager et de m’entraîner.
LES JEUX OLYMPIQUES ÉTAIENT, DITES-VOUS, UN RÊVE INACCESSIBLE? MÊME SI VOUS N’ÊTES JAMAIS MONTÉ SUR LE PODIUM, QUEL SOUVENIR GARDEZ-VOUS DE VOS TROIS PARTICIPATIONS?
J’en garde trois souvenirs différents. Les Jeux olympiques de Vancouver restent immanquablement mon plus beau souvenir, car c’était les premiers, dans notre pays en plus. Devon et moi avons obtenu une quatrième place alors que personne ne nous attendait. Nous avons créé la surprise. Les Jeux de Sotchi ont été entachés par la crise médiatique que j’ai vécue à propos de l’équipement, sur laquelle je reviens dans le livre. Quant aux Jeux de Pyeongchang, ils restent un très bon souvenir puisque j’y ai réussi parmi les plus belles performances de ma carrière.
QUELLE EST, DE VOTRE POINT DE VUE, VOTRE PLUS GRANDE VICTOIRE?
D’un point de vue strictement statistique, c’est mon titre de champion du monde sur 50 km en Finlande en 2017. Mais d’un point de vue émotionnel, c’est ma victoire sur les Plaines d’Abraham à Québec en 2017. Même si ce n’était qu’une épreuve de la Coupe du monde, il reste que les compétiteurs étaient les mêmes.
VOUS PARLEZ SANS TABOU DE L’ARGENT QUE VOUS AVEZ GAGNÉ AU COURS DE VOTRE CARRIÈRE. POURQUOI AVOIR ABORDÉ CE SUJET DE MANIÈRE SI FRANCHE?
On a encore beaucoup de misère à parler d’argent au Québec. Je suis fier d’avoir pu vivre de mon sport et je voulais passer le message qu’il est possible de le faire si on est bien entouré. D’ailleurs, l’objectif de ce livre en général est que les gens en apprennent plus sur moi, mais aussi sur le monde du sport de haut niveau. Simon [Drouin] et moi voulions montrer mes succès, mais aussi l’envers de la médaille. Les bons contrats de commandites impliquent de bien performer. Pour cela, il faut s’entraîner loin de chez soi et vivre une vie de moine.
VOUS ÊTES AUJOURD’HUI AVOCAT. CONTINUEZ-VOUS À PRATIQUER CERTAINS SPORTS?
Oui, je reviens tout juste de faire une sortie en vélo à pneus surdimensionnés. Je fais encore souvent du ski de fond l’hiver. L’été, je fais du vélo de montagne et de la course à pied en sentier. Je suis aussi porte-parole du Pentathlon des neiges à Québec. Cette année, j’ai participé à un triathlon pour la première fois. Et avec mon cabinet d’avocats, nous avons participé au défi d’entreprise et nous avons gagné! C’est une grande fierté!
VOUS AVEZ UNE FILLE DE DEUX ANS. FAIT-ELLE DÉJÀ DU SKI? À LA FIN DU LIVRE, VOUS DITES NE PAS ÊTRE CERTAIN DE VOULOIR QU’ELLE FASSE DE LA COMPÉTITION PLUS TARD, POURQUOI?
Elle a commencé le ski alpin, mais le ski de fond, ce sera l’année prochaine! Pour ce qui est de la compétition, ni ma conjointe ni moi ne la pousserons. Le monde du sport est très exigeant et peut engendrer de la détresse psychologique. Si elle veut faire de la compétition plus tard, il faudra que cela vienne d’elle.